19/08/2010

Seconde table ronde : Les Centraliennes à l'étranger

Pour élargir le débat à la situation dans d’autres pays, nous avons souhaité interroger des Centraliennes françaises travaillant à l’étranger.
Au travers de l’exemple de huit Centraliennes qui ont témoigné de leur expatriation, nous vous proposons de regarder la situation dans certains pays voisins ou lointains de la France :


La Norvège
En Norvège les femmes rencontrent beaucoup moins d’obstacles dans leurs carrières qu’en France. Elles sont encouragées par les entreprises à prendre des responsabilités. Ainsi Mélanie Devergez (ECN 06) après avoir suivi un Master à Trondheim et appris le norvégien a tout de suite trouvé du travail dans le secteur maritime en 2008. Une année qui a vu un marché de l’emploi en plein essor. Aujourd’hui Mélanie est chef de projet chez DNV Det Norske Veritas, une société de classification à Oslo. Depuis 4 ans DNV a mis en place un programme international de ‘’mentoring’’ pour les femmes, afin de les soutenir et les former pour les postes de chef de service. Il est à noter que les horaires norvégiens de travail vont de 8h à 16h, ce qui laisse la place pour une seconde journée. De plus, tout parent reçoit 10 jours de congés par an et par enfant destiné à la garde d’un enfant malade. La Norvège est sans doute le pays le plus avancé sur la parité. Le congé parental de 12 mois peut être partagé entre la mère et le père (6 semaines minimum pour la mère et 2 semaines minimum pour le père). Depuis 2004, le gouvernement impose des quotas dans les conseils d’administration. Ainsi dans les sociétés anonymes publiques (2004) et les sociétés cotées en bourse (2006), il doit y avoir une représentation minimum de chaque genre parmi les membres des conseils, soit 40% environ. Il y a une réelle volonté gouvernementale en Norvège d’atteindre la parité homme / femme, la culture du pays allant dans ce sens.

Le Mexique
Le témoignage d’Elsa Marques (ECL 99) est très étonnant. Elsa est partie au Mexique pour vivre une expérience différente à la sortie de l’école. Elsa Marques gros plan + labo.JPG
Aujourd’hui, Elsa est mariée avec un Mexicain. Elle est chef de laboratoire R&D, chez TENARIS TAMSA au Mexique. Malgré cette réussite professionnelle, la culture mexicaine semble préférer que les femmes ne travaillent pas afin qu’elles puissent s’occuper des enfants alors même que la garde d’enfants paraît plus simple qu’en France. En effet, les femmes qui travaillent cotisent à l’IMSS (Sécurité Sociale Mexicaine) et ont accès gratuitement à des crèches très convenables. Cependant les femmes cadres préfèrent avoir quelqu’un à la maison car c’est beaucoup moins cher qu’en France. Le point noir reste les horaires des cadres qui sont très longs (45h et plus) et le peu de congés payés, en général 2 semaines seulement. Apparemment, le Mexique semble être un pays où les femmes ne sont pas très bien acceptées en entreprise.

Les Pays Bas
Florence Hélière (ECM 93) est partie aux Pays Bas à la suite d’un choix familial. Ce fut l’opportunité de suivre son mari et de pouvoir profiter de son petit garçon d’un an. Très vite Florence a eu envie de reprendre une activité professionnelle mais aux Pays Bas il est culturellement préférable que les femmes ne travaillent pas afin qu’elles puissent s’occuper des enfants. D’ailleurs les crèches sont rares et très chères. Cependant Florence a trouvé un poste intéressant à l’Agence Spatiale Européenne qui prône la diversité. La situation s’améliore, ainsi en 2002, 8% des femmes occupaient des postes qualifiés, alors qu’en 2008 c’était 16%.

La Suisse
En Suisse, l’évolution de carrière des femmes est parfaitement possible si les compétences sont là. Ainsi Sylvie Turbelin (ECLi 94) qui est aujourd’hui directrice d’hydro global site installation du groupe Alstom en France a eu en 2007 l’opportunité de travailler en Suisse pour Alstom. Malgré les opportunités de carrière, gérer sa vie familiale semble aussi compliqué qu’en France.

L’Autriche
Sophie Martre (ECP 81) en suivant son mari Centralien a vécu une expérience au Japon puis en Autriche. Sophie Martre ECP81.png
Pendant ces années passées à l’étranger, Sophie Martre s’est préparée à sa nouvelle activité et vient de lancer fin 2009 son activité de conseil, formation et coaching en proposant des services RH de proximité. Au Japon comme en Autriche il semble préférable que les femmes ne travaillent pas afin qu’elles puissent s’occuper des enfants même si cela change depuis peu en Autriche. Dans ces deux pays les femmes restent mal acceptées dans l’entreprise. Bien que l’état autrichien fasse beaucoup d’efforts pour celles-ci, l’évolution reste lente. Malgré tout il n’y a toujours pas d’écoles maternelles que l’Etat compense par des allocations familiales dégressive jusqu’aux 6 ans de l’enfant. Avec l’assurance que l’employeur réembauchera les femmes 6 ans après la naissance d’un enfant, aux conditions de temps partiel qu’elles souhaiteront. Quelques femmes apparaissent à des postes de responsabilité mais cela reste faible.

L’Italie
Etonnant ce témoignage de Mathilde Prot (ECL 00) qui après un double diplôme, ECL et Politecnico di Milano option bâtiment, a tout de suite été contactée par Qualigroup pour la création d’une filiale Qualiconsult en Italie. Aujourd’hui, cette filiale compte 50 personnes, et est l’un des organismes d’inspection les plus importants d’Italie. Mathilde Prot.png
Dans ce pays, Mathilde relate le manque de crèches, très chères, et l’absence d’assistantes maternelles. En clair, il faut se débrouiller. De plus, le droit italien permet aux femmes de reprendre le travail seulement un an après la naissance de leur enfant. Les employeurs hésitent donc à embaucher des femmes. Il est difficile en Italie de concilier carrière professionnelle et vie de famille.

Il ressort de tous ces différents témoignages, que les clés pour réussir à l’étranger sont : la maîtrise de la langue, une vraie curiosité envers le pays d’accueil ; sa culture ; son histoire, enfin la volonté de s’intégrer en participant aux évènements sociaux et culturels.
Avant de partir, de précieux conseils peuvent être obtenus sur le site des affaires étrangères (très bien fait).
Enfin, toutes les Centraliennes interviewées affirment que c’est une expérience très enrichissante à titre professionnel et également pour toute la famille.

Propos recueillis par Corinne Jaxel (ECLi 1985)